Le roman de la beauté, de son sens, de son pouvoir, de son machiavélisme, de sa damnation. Des femmes belles, si belles, trop belles ( ?), liées par le destin. Mara Lee conte l’histoire de chacune, les rencontres, les joies, les tensions, le malaise, l’affliction. Il y a beaucoup de souffrance dans ce roman. Il faut être en chacune, au cœur de ce qui les constitue, pour comprendre. Il est aisé de se perdre au travers des chapitres allers et retours temporels et géographiques, mais la dispersion du lecteur semble conçue pour mieux le surprendre à l’approche de l’objectif final. Entre l’ambigüité de Siri, personnage central, et la détermination de Léa, la galeriste, semble respirer l’ancien manque de confiance en elles mué en une exceptionnelle résolution à jouer avec les humains – ou plutôt la beauté humaine, qu’il devient nécessaire de restituer à une place moins appréciable. Une fragilisation destinée à restreindre la douleur… par la douleur. Cela peut apparaître comme un paradoxe. Mais c’est bel et bien de cela qu’il s’agit. Le regard de photographe de Siri impose la mise en situation extrême de ses charmants modèles pour en extraire choc et provocation. Le poids des séquelles restant sans importance pour l’artiste. Léa devient donc ordonnatrice d’un étrange projet de vengeance relevant d’un diabolisme latent. Les pages de Mara Lee creusent au cœur de cet étonnant contraste où perfection rime avec tourments et supplices, posant pierre après pierre les contreforts d’un édifice encombrant destiné à s’écrouler. La futilité des mondes de la mode et de l’art est exacerbée, contrainte dans ses retranchements ultimes, jusqu’à l’étrange rédemption tenue en laisse dans la dernière phrase. Il fallait savoir observer de l’intérieur la flamboyance apparente et en restituer les méandres profonds et torturés. « Beautées volées » en est l’exceptionnelle chronique.

CET ARTICLE A ÉTÉ RÉDIGÉ PAR :

Marc Sapolin
De l’organisation de concerts aux interviews d’artistes il n’y avait qu’un pas. Plus de vingt-cinq ans de rencontres avec les artistes et toujours la passion de la découverte.

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