Connaissez-vous le geomungo, instrument traditionnel coréen doté de six cordes très longues autorisant des sonorités d’un grave colérique à des harmonies suaves ? L’instrument est ici joué par E’Joung-Ju, musicienne classique, qui opère pour le projet Moon Gogo en duo avec Federico Pellegrini – celui des Little Rabbits et French Cowboy, souvent vu sur scène avec ce dernier groupe en back band officiel de Katerine (juste pour signifier l’étendue des possibles). Créé en 2013 en réponse à une commande d’un programmateur nantais, la formation originale a su trouver suffisamment de repères pour s’affirmer sur la distance. Cet album démontre comment il est possible d’associer des genres musicaux qui pourraient facilement être considérés comme antinomiques, aussi bien que l’idée que la création est à la portée de toute ambition. Si le geomungo va souvent créer une atmosphère par le biais de ses étonnantes sonorités (« The Start », « You Say I »), Federico Pellegrini va user, en même temps qu’il va poser sa voix, de guitare, claviers et boite à rythmes, le tout enrichi ou déformé par des pédales d’effets. « Chulgang (Nowhere at a Time) » apparait tout d’abord comme un morceau traditionnel, très vite rattrapé par le placement d’un chant aux limites d’une sorte de rap-slam-talk-over, pour s’adoucir, évoluer vers une forme chanson et ensuite reprendre du poil de la bête en s’excitant soudain. Ainsi va la magie de la musique. « Good Enough » s’annonce comme un morceau électro complètement dans l’air du temps. « Sally’s Gone » pose sa grosse guitare bien saturée sous un chant délicat et réverbéré à la Joy Division. A chaque fois, le geomungo investit d’une couleur toute inédite et pleine de fraîcheur le morceau, comme aurait pu le faire un synthétiseur, sauf qu’ici, il s’agit d’un instrument caractéristique. C’est ce qui ressort sur « Panema » qui, définitivement, ne peut être comparé à rien d’autre qu’à lui-même en raison de ces sonorités donnant une couleur tellement distincte quelle que soit la constitution musicale alentours. Et « Starr » propose une très jolie coda à cet album, usne ballade qui aurait un petit air de country asiatique.

CET ARTICLE A ÉTÉ RÉDIGÉ PAR :

Marc Sapolin
De l’organisation de concerts aux interviews d’artistes il n’y avait qu’un pas. Plus de vingt-cinq ans de rencontres avec les artistes et toujours la passion de la découverte.

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