C’est à l’occasion de leur concert à l’Espace Julien que nous avons eu la chance d’échanger avec le groupe The Pirouettes.
Si vous n’avez pas la chance de les connaitre, c’est un couple : Vicky Chérie et Léo Bear Creek, aux manettes d’une Électro Pop dansante, énergique et tendrement originale.
Après un premier album « Carrément, Carrément » datant de 2016 qui avait ravi la critique et les mélomanes, The Pirouettes n’ont pas perdu de temps et ont sorti son petit frère « Monopolis » au mois de septembre 2018.
À l’aide d’une prod toujours plus chiadée et de paroles aussi inspirées que travaillées, ils nourrissent petit à petit leur vaste univers mélancolique, amoureux et décalé.

C’est en début de soirée que je me dirige vers les loges de l’Espace Julien afin de retrouver Léo, un peu fatigué après des balances éprouvantes.

 

 

Interview :

 

Vous avez sorti votre deuxième album « Monopolis » le 28 septembre. Dans quel état d’esprit avez-vous produit ce nouvel opus ?

On avait envie d’aller vite parce qu’on avait trop kiffé la tournée précédente pour le premier album et on avait envie que ça recommence le plus vite possible. Donc on s’est dit : « on va refaire un album pour ça » !
En plus on avait envie d’écrire de nouvelles chansons.
C’était cool, on a travaillé avec des gens différents  sur le deuxième album, il y avait des compositeurs annexes qui se sont rajoutés au processus.

 

De qui vous êtes vous entouré pour ce nouvel album ?

Il y a eu Dodi El Cherbini. C’est un mec qui fait de la chanson française très très cool, très moderne, je suis hyper fan ! Il a bossé pour Phoenix aussi assez récemment et il a produit 2 morceaux qui sont « Si léger » et « Petit château ».
Il y a Vaati  qui joue avec nous sur scène de la basse et qui a fait « Ça ira ça ira », « Avec le cœur » et « Baisers volés ».
Il y a Lewis OfMan qui a fait « Tu peux compter sur moi » et il y en a un dernier qui a fait « Héros de la ville ».
Après quand je dis « ils ont fait », ils n’ont pas tout fait. Nous on a écrit les paroles et les mélodies de voix, parfois on a écrit certains arrangements, mais ils ont composé une instru à la base.
Et après on a quelqu’un qui nous aide en studio qui s’appelle Jérémy Rassat et qui fait en sorte que tout ça soit cohérent. Comme plusieurs personnes ont travaillé sur un même album, ça sonne pas forcement de la même manière et on remet tout à niveau. Après derrière on fait mixer et c’est comme ça que l’album sonne trop bien au final. Il y a beaucoup de gens qui ont participé, on est bien entouré !

 

Dans « Monopolis », on sent une évolution de style : on retrouve bien sûr la patte de The Pirouettes mais la musique semble plus légère, plus minimaliste. Que diriez vous de cette évolution ?

Tu trouves ? J’ai l’impression que c’est assez riche en terme d’arrangements, qu’il y a pas mal de couches… Peut être plus épuré par moment, c’est possible…
Par contre, moi, j’aimerais bien que l’on arrive à épurer encore plus parce que j’aime quand la musique prend son temps, quand elle est calme, quand il n’y a pas beaucoup de sons.
Je trouve que le dernier album de Flavien Berger est excellent à ce niveau là, je trouve que la prod est impeccable parce que chill, très posée. J’aimerais bien aller dans cette direction par la suite, pourquoi pas.
Mais je n’ai pas le sentiment qu’on ait épuré comme tu dis sur le deuxième, peut-être que ça s’est affiné, peut-être que ça sonne mieux. Ça c’est sûr, ça sonne mieux, je préfère aussi mais épuré je ne sais pas.

 

Vous avez récemment joué à l’étranger, à New York notamment. C’est rare pour un groupe Francophone de réussir à sortir de l’hexagone. Comment vous vous y êtes pris et de quelle manière vous le vivez ?

Il y a un organisme qui s’appelle le Bureau Export qui aide les groupes français à s’exporter et c’est grâce à eux qu’on est allé à New York et à Montréal.
À Montréal c’était dans le cadre d’un festival : « M pour Montréal », et à New York c’est une date qu’ils nous ont arrangée pour que l’on ne fasse pas le déplacement pour une seule date.
Mais la bonne nouvelle c’est qu’il y avait du monde à New York ! Il y avait pas mal d’Américains qui avaient découvert le groupe sur Spotify et aussi des français expatriés. Mais bon on avait une belle salle devant nous ! Il devait y avoir 100 personnes, on ne s’y attendait pas !
La salle s’appelait Drom, et c’était dans East Village.
C’était top, on dormait à Brooklyn dans un petit Airbnb incroyable avec un Rooftop. C’était une putain d’expérience, on a trop kiffé vivre ça en groupe. C’est vraiment ce qu’on préfère faire en fait : voyager.
C’est un peu le but ultime. Le moment où tu commences à voyager pour la musique tu es vraiment au top de ta life (rires).

 

Ça donne envie … j’imagine que ça vous inspire pas mal aussi ?

Oui tout à fait, c’est dépaysant, c’est inspirant c’est clair !
Quand tu joues à Montpellier ou à Marseille c’est cool mais c’est pas la même magie. Il y a quelque chose de plus routinier, c’est la France, on les connait ces salles…
Mais bon, on est content ! C’est là où le public est le plus chaud donc j’ai quand même hâte de jouer ce soir.

Vous êtes de Annecy, qu’est-ce que représente cette ville pour vous ?

C’est la maison ! C’est là que nos parents habitent, aussi bien les parents de Victoria que les miens et c’est là qu’on s’est rencontré. Et on a du plaisir à y retourner.
C’est là-bas que nous enregistrons aussi, chez notre pote Jérémy Rassat dont je te parlais tout à l’heure. À chaque fois que l’on enregistre des trucs on va là-bas. On est assez souvent à Annecy.


Vous jouez ce soir à Marseille, que pensez vous de cette ville ?

Marseille vraiment on adore ! On en parlait tout à l’heure, à chaque fois qu’on est venu c’était trop cool, j’adore l’ambiance de la ville.
J’aime vraiment et j’ai un peu envie de venir vivre ici. Je me pose la question.  Il y a beaucoup de potes à nous qui déménagent et on se dit pourquoi pas…

 

Vous avez fait un Featuring avec le rappeur Hyacinthe sur sa musique « Avec nous », en quoi a consisté votre collaboration ?

Justement hyacinthe jouait avec nous hier soir en première partie !
C’est nous qui avons choisi le beat maker, c’était un pote : Lucas Ortiz. Et sinon on a juste écrit les paroles et une mélodie.

 

Est-ce que de composer pour d’autres projets musicaux est une chose qui vous intéresserait à l’avenir ?

C’est une expérience qu’on va renouveler en plus parce que Hyacinthe sort un nouvel album bientôt et il aimerait qu’on refasse un featuring. Cette fois sur une instru un peu plus pop, d’ailleurs on a déjà un bon début !
C’est toujours agréable d’écrire pour des projets différents, ça nous permet de varier un peu l’écriture, on se permet d’être un petit peu plus Rap quand on fait des trucs avec Hyacinthe. Ce n’est pas forcément le cas pour « Avec nous », mais sur la prochaine qui arrive il y a pas mal d’insolence et d’ego trip, c’est un truc qu’on n’aurait pas forcément fait pour The Pirouettes parce qu’on n’a pas envie de trop pousser ce côté-là. Mais avec Hyacinthe c’est marrant !
J’adorerais écrire pour d’autres gens, pour l’instant personne ne me l’a demandé…  Visiblement je ne suis pas un assez bon Songwritter pour eux (rires).
Mais je kifferais trop écrire pour une petite meuf ou un truc comme ça !

 

J’avais une question pour Vicky mais peut-être que tu pourras me répondre à sa place. Je sais qu’elle a un grand rôle vis-à-vis des visuels de The pirouettes et qu’elle réalise une bonne partie de vos clips …

Oui, elle a fait celui de « Baisers volés » récemment, qu’on a tourné en Grèce, qui est très cool, et elle a fait aussi « L’escalier » qui est notre clip à 1 million  de vues, le plus populaire. Elle avait aussi fait un mini documentaire qui s’appelle « L’amour, le succès ». C’est un faux documentaire en fait, c’est une Fiction chelou, tu iras checker, c’est marrant. C’était pour la sortie du premier album et ça a plu, c’est du contenu que les gens n’ont pas l’habitude de voir de la part d’un groupe, c’était original.
C’est elle qui nous fait toutes les pochettes aussi et jamais elle laissera quelqu’un d’autre le faire ! Elle manie Photoshop à merveille…

 

 

Je voulais aussi aborder avec elle la pochette de Monopolis, vous êtes partis de quelle idée et quel message vous vouliez faire passer ?

Alors à la base on s’est inspiré d’une photo tirée de « A star is born », la version des années 70 avec Barbara Streisand. C’était leur pose sur une série de photos que l’on trouvait intéressantes. Il y avait ça et puis aussi les poses d’un manga,  je ne sais plus lequel, qui nous avait influencé.
Après il fallait nous mettre dans le décor, dans la ville de Monopolis qui est à la fois rétro et futuriste, avec des montagnes, des immeubles, on ne sait pas trop où c’est… Mais Vickie  aurait était bien meilleure que moi pour cette question !

 


Outre vos inspirations musicales, y a-t-il d’autres formes d’art qui vous inspirent ?

Oui on est cinéphile de Ouf, j’aime beaucoup aller au cinéma et j’y vais assez régulièrement.

 

Quel film t’a marqué récemment ?

Le film français « Shéhérazade » qui est sorti il y a quelques semaines, je te le conseille.
On est fan de Paul Verhoeven aussi, toute sa série de films un peu science-fiction genre Robocop, Total Recall, ça nous a vraiment beaucoup inspiré.
Kubrick pareil, c’est un génie, j’aime tous ses films. Voilà je pourrais t’en citer plein en fait, là je te cite des noms au hasard.
On adore aussi James Turell, ça pour le coup ça nous a beaucoup inspiré pour la scénographie que tu vas voir ce soir ainsi que pour les visuels. C’est un artiste contemporain qui fait des installations à base de lumière naturelle et de lumière artificielle, c’est incroyable je te conseille d’aller cheker. C’est un américain.

 

Avec Vicky vous êtes Végétarien, signe d’implication pour la cause animale ainsi que pour l’écologie. Que peux tu nous en dire ?

Oui, on est végétarien par conviction. C’est-à-dire qu’on trouve ça dégueulasse de faire souffrir les animaux comme ça dans les abattoirs. La production industrielle dominante elle est ignoble …

 

Que peux-tu nous dire sur la vision que vous avez du monde aujourd’hui ?

On se dit que c’est de plus en plus absurde autour de nous. Et on commence à se dire qu’il faut peut-être accepter de vivre dans l’absurdité.

 

… Donc résignée mais impliqué ?

(Rires) Oui je sais pas trop où j’en suis dans ma tête…

 

 

Est-ce que vous avez suivi des formations musicales ou êtes-vous purement autodidactes ?

Non moi j’ai quand même fait du conservatoire quand j’étais petit. Je faisais de la batterie et j’ai eu quelques cours de solfège, etc. donc j’ai eu quelques notions qui me permettent aujourd’hui de savoir composer. Après je ne suis pas un grand claviériste, je compose au piano mais je ne me considère pas comme un grand claviériste. Je m’aide juste pour la compo.


De nouveaux projets à annoncer en plus de celui que vous allez mener avec Hyacinthe ?

On a quelques morceaux en rab qu’on n’a pas mis sur l’album donc peut-être qu’il y aura une version de luxe de l’album, qui sait ?
Je ne sais pas… Il faudrait peut-être que ça marche un peu mieux pour ça.


Pourquoi, l’album ne marche pas comme vous l’auriez souhaité ?

Si, ça va, mais c’est à peu près le même succès que le premier, on a pas pété les scores, on s’attendait à faire mieux.
Après la première semaine on a quand même fait trois fois plus en termes de vente que le premier. C’est déjà bien mais j’ai l’impression que ça s’emballe moins médiatiquement, il y a moins de journalistes autour de nous.
Mais c’est aussi parce que les gens sont cons, ils ont toujours besoin de nouveautés.
Enfin quand je dis les gens sont cons… Je parle surtout des journalistes qui se focalisent sur les nouveaux groupes. Ils vont tous voir en masse les nouvelles têtes et délaissent un peu les projets cool qui sont sortis il y a quelques années et qui font un deuxième album.
Enfin bon je dis ça mais je ne suis pas amer ou quoi que ce soit, je m’en bas les couilles en fait (rires).

 

Quelles sont vos découvertes musicales récentes ?

Moi j’écoute beaucoup Agar-Agar en ce moment, en tant que groupe français ils sont au top. Sinon il y a un morceau de Holger Czukay, qui s’appelle « Persian love » et que je trouve incroyable, c’était une belle découverte !
En fait il y a tellement de trucs que j’écoute en ce moment … Polnareff aussi, je suis pas mal dedans en ce moment, je trouve ça très bien.
J’aime beaucoup le rappeur 6ix9ine aussi, c’est un américain, il est au top des charts en ce moment, c’est le meilleur.
Il fait de la musique bien bête et il véhicule une image bien bête aussi mais je trouve ça cool. Il est un peu en mode : « je prends de la drogue, je prends la drogue et c’est cool, prenez de la drogue, prenez de la drogue » (rires), tu vois son délire ?
Mais c’est marrant.

 

Quel serait votre feat de rêve ?

Justin Bieber ! Ce n’est pas très original comme réponse, on le dit tout le temps mais en vrai c’est un peu mon idole donc j’en serais très content.

 

Pour finir, je sais que vous êtes fan de Michel Berger et je me demandais si on pouvait s’attendre un jour à voir débarquer un Starmania façon The Pirouettes ?

(Rires) Après avoir fait l’album Monopolis qui reprend déjà bien les codes ce serait peut-être un peu lourd mais pourquoi pas.
Si par exemple il y a une adaptation cinéma de Starmania on serait ravis d’y participer. Si quelqu’un veut nous inviter à être personnages, acteurs… pourquoi pas !
Après je ne sais pas si vocalement on a le niveau parce qu’il faut quand même y aller pour chanter du Balavoine. Mais en tout cas ce serait marrant !

 

Pendant que Léo retourne dans sa loge pour se préparer au concert, la tension monte dans la salle de l’Espace Julien … Jusqu’à l’entrée en piste du groupe !

Une scénographie mémorable ! Des jeux de lumière travaillées, un écran géant projetant des vidéos chiadées, une installation scénique à étages permettant à Léo et Vicky de développer leur univers de façon originale… Un vrai spectacle !
Si une chose est sûre c’est que The Pirouettes ne se moquent pas de leurs fans ! En plus de cette scénographie de haut vol, le groupe nous a régalé avec leurs tubes incontournables mais nous ont aussi présenté les pépites de leur dernier album.
Si vous ne les avez pas encore vu en concert, c’est le moment de prendre sa place ! Ils sont encore en tournée jusqu’au 14 décembre.

 

CET ARTICLE A ÉTÉ RÉDIGÉ PAR :

Raphaël Carlier
Musicologue, musicien et rédacteur spécialisé en musique Pop et électronique.

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