Elle semble avoir débarqué de nulle part. On l’a vu sur la toile avec ses textes qui dénotent, ses clips cocasses et engagés. « Illustre », qui se cache derrière ce personnage ? D’où sort-elle ? Nous avons souhaité partir à sa rencontre pour la comprendre et découvrir son univers ainsi que son identité.
Vous donnez l’impression d’avoir débarqué sur la toile à l’improviste alors que, finalement, il y a plus d’un an vous aviez sorti le projet « Les mains bleues ». Pour mieux connaître votre parcours, pourriez-vous nous raconter votre premier coup de foudre musical puis votre premier texte ainsi que les événements qui vous ont permis d’aboutir à ce premier album ?
J’ai commencé à écrire au collège. C’est ma prof de français qui nous a fait écrire un poème en interro surprise. C’est une bonne note qui m’a démontré que je pouvais être bonne dans quelque chose. J’ai donc continué d’écrire de mon côté. En revanche, c’est seulement fin collège que j’en suis venu à écrire du rap. J’ai commencé à écrire des slams sur mes profs pour rigoler avec les copains. Ensuite, c’est des artistes à textes qui m’ont permis de m’orienter petit à petit vers ce style musical que j’écoutais moins initialement. J’ai donc commencé à enregistrer des textes de rap. J’ai ensuite fait trois ans de beaux-arts. C’est pendant ce cursus que j’ai rencontré mon meilleur ami qui faisait de la musique en autoproduction. Il m’a aidé à prendre conscience de cette possibilité. C’est pour cela que j’ai réfléchi à la manière de produire un EP.
Ma première scène dans ma ville, pour un concours, c’était End Of The Weak. Je ne me rendais pas compte de l’envergure du concours, j’ai juste eu envie de tester la scène HipHop de ma ville. Au fur et à mesure des rencontres j’ai fait des petits concerts dans ma ville puis j’ai fini par faire la connaissance de mon manager. Il m’a vu sur scène et m’a proposé une date pour laquelle je devais avoir un DJ sur scène. Comme je n’en avais pas, j’ai lancé un appel sur Facebook. Cela m’a permis de rencontrer mon DJ. Le feeling humain et l’envie de pousser un projet plus loin nous ont motivés à travailler ensemble. Tout a été rapide et naturel. On a enchaîné les petites dates. Pendant un an on a fait un album et on a fini par rencontrer le label qu’il nous fallait. On a signé en début d’année 2020.
Pour résumé, « Les mains bleues » a été produit lorsque j’étais seule et que je n’avais pas encore mon équipe. On a souhaité le sortir parce que ça me tenait à cœur, mais on n’a pas mis de promo parce que derrière il y avait l’album et l’identité musicale. C’est avec l’album qu’on a vraiment poussé le truc.
Justement, au sujet de votre équipe, pourriez-vous nous en dire plus ? Quelles sont les personnes qui vous accompagnent tant sur les morceaux que sur les clips ?
Pour les beatmakers, c’est des gens de ma ville. Ils sont 4 sur l’album. Il y a Zicol, Lowerz, LigOne et Rrobin. On est vraiment la dream team de ma ville (rire). Mon Dj Lowerz, a été deux fois vice-champion de France. Rrobin a été pris pour les Ïnouis. On a vraiment cherché une identité sonore chez les beatmaker plutôt que de prendre des types Beats sur le net.
J’ai aussi un manager. Il était de ma ville mais a bougé sur Nantes. À l’heure actuelle, le label avec lequel j’ai signé c’est X-Ray Production qui est sur Paris. J’ai aussi pris plusieurs attachés de presse autour.
L’écriture et l’interprétation c’est moi.
Ce premier album a un titre qui veut dire beaucoup. Il est en deux parties. Pourriez-vous nous en parler ?
« Ille » – c’est le pronom personnel du genre non binaire. J’avais vraiment envie de le mettre en évidence parce qu’aujourd’hui on voit la société devenir binaire.
L’album et sa conception ont été réfléchis en deux parties bien distinctes pour refléter deux de mes personnalités : une plus virulente et une plus introspective. L’idée est de montrer que les deux sont possibles et qu’il est possible de nuancer, de casser les extrêmes.
Quel est le morceau qui a été le plus compliqué à écrire ?
(temps de réflexion)
Je dirais « Recommencer ». Ce n’est pas vraiment que ça a été difficile à écrire, mais la difficulté est liée à l’instru. Je suis sortie de ma zone de confort. Je n’arrivais pas à appréhender l’instru et je me suis forcée à essayer jusqu’à réussir. Cela m’a permis d’ouvrir des portes sur mon flow.
Certains de vos textes peuvent être vus comme polémiques. Est-ce qu’à un moment vous vous êtes projeté en les écrivant en vous demandant s’il y aurait des réactions spécifiques ?
« Mémoire » j’appréhendais. J’ai pris un autre angle que celui qui est habituel dans le rap qui est plutôt de critiquer la France. J’ai pris le parti du « Tout n’est pas cool on est d’accord, mais c’est quand même un pays où il y a plein de choses biens en termes de culture, de diversité, etc.)
Je partage mes morceaux sur plusieurs réseaux et sur TikTok celui-ci est devenu complètement viral. Cela m’a énormément surpris. Comme TikTok est un réseau ciblé jeune, 15 – 20 ans, je ne m’y attendais pas. Il a suscité de la réflexion, les gens ont rebondi dessus. Cela m’a touché.
Si grâce à votre musique vous pouviez faire évoluer la société sur un sujet ce serait lequel ?
Je dirais la tolérance parce que ça regroupe plusieurs domaines. J’aurais pu dire la place de la femme aussi. Mais je souhaite surtout qu’il y ait plus de justice dans le fonctionnement humain, plus de tolérance, d’acceptation de l’autre, de regard sur soi, de remise en question.
Si on devait mettre un titre de votre album en avant et qui n’a pas été clippé ce serait lequel ?
« Immergé » parce que c’est un de mes préférés. En termes de flow il bouge beaucoup. Sur certains aspects il y a plus de techniques. Dans ce morceau je raconte vraiment la réussite sous un autre angle d’attaque. Là où aujourd’hui les rappeurs la racontent avec de grosses voitures et des femmes à poil, pour moi la réussite c’est d’avoir peu de monde autour de moi, mais avoir les vrais, avoir la confiance des gens qui sont autour de moi. Le principal n’est pas de vendre du rêve, mais d’être bien entouré.
Quelles sont vos prochaines étapes ?
Je suis en train d’écrire le deuxième album. Un album c’est toujours un an de préparation. On essaie de jouer un peu, mais avec le Covid c’est compliqué. On pallie un peu avec les réseaux.
La suite est donc la préparation du deuxième album et essayer d’agencer la programmation en fonction du Covid. En ce moment c’est donc une étape d’écriture et de promo.
Nous remercions Illustre pour le temps qu’elle nous a accordé et vous invitons vivement à découvrir son album.
CET ARTICLE A ÉTÉ RÉDIGÉ PAR :
- Rédactrice en chef adjointe et webmaster d'Extended Player. Amoureuse du rap français et des bonnes punchlines, je pilote la section rap du mag depuis que j’ai 11 ans (oui, déjà !). En parallèle, je suis communicante freelance et chef de projet web, avec une expertise en e-commerce. Toujours connectée, toujours à l'affût des sons qui parlent et qui touchent !
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