Un soir d’hiver, lorsque le froid n’a pas daigné se montrer, qu’y-a-t-il de mieux qu’un rendez-vous avec Stephan Eicher, artiste magique au show chimérique ?

Rien… surtout si le rendez-vous se fait à Marseille, en bord de mer, au Silo, bâtiment historique et culturel baptisé en 2004 «Patrimoine du XXe siècle ». Anciennement silo à blé, il a révolutionné la manutention portuaire dans le débarquement et l’acheminement mécanique des céréales. Après plus de 50 ans d’essor, puis 20 ans d’inactivité, le Silo a aujourd’hui revêtu sa tenue la plus classe et propose désormais différentes salles de spectacle et espaces de restauration. C’est au sein de ce paysage portuaire que la dix-huitième édition du Festival Avec le temps, festival dédié à  la chanson française, nous convie ce soir.

Entre 18  et 19h, le public commence à s’installer de part et d’autre de la salle de spectacle, après avoir siroté un verre de pastis ou de vin rouge. La moyenne d’âge semble exclure les plus jeunes et seulement le parterre et les premiers balcons sont pleins.

19h30, l’artiste a du retard. Il se fait désirer pendant une petite demi-heure, jusqu’au moment où le rideau rouge finit par s’ouvrir, entrainant un tonnerre d’applaudissements. L’homme apparait enfin. Seule, sa voix chantonne timidement la chanson « Me taire ». Puis, accompagnée de sa guitare, sous de petits jeux de lumière, cette même voix prend ensuite de l’assurance et se met à raisonner, nous présentant ainsi « Donne-moi une seconde ».

Beau, doux et poétique, le début du spectacle ressemble à un concert de chanson française de qualité, mais, jusque-là, ordinaire. Or, quelques indices nous laissent imaginer une suite un peu plus « mécanique ». Avec comme nom de festival « Avec le Temps », comme nom de tournée «Und die Automaten », et comme nationalité « Suisse », les mots, « horlogerie » et « automate » ne peuvent qu’être en symbiose avec le spectacle. Pour nous donner raison, Stephan Eicher entame le dialogue, instaure un climat d’intimité et de convivialité avec son public, puis nous affirme être en train « d’accorder ses amis les automates ». Cette manipulation musicale étonnante donne naissance à des « percussions digitales » semblant provenir du xylophone. Les cymbales prennent alors la suite, puis le décor s’emballe et la chanson « 1000 vies » s’échappe de scène.

Stephan Eicher, Und die Automaten Pour charmer le public, l’humour se joint à cette présentation magique et surnaturelle. L’artiste suisse, calme et éloquent, mêle blagues et jeux de mots pour amener son point de vue critique et pertinent sur notre société. Stephan ne lésinera pas sur cette dose d’humour, il en implémentera son spectacle au point de nous muscler les zygomatiques bien plus que de coutume. Enthousiasmantes à partager, nous aurions pu vous raconter chacune de ses plaisanteries, mais quiconque prendrait part à «Und die Automaten » par la suite, aurait eu son plaisir gâché. Le répertoire, quant à lui, alterne entre chansons phares de l’artiste et petites nouveautés. C’est ainsi qu’une parenthèse facétieuse ouvre la suite du spectacle sur l’incroyable « Combien de temps ».

Puis, l’ambiance se trouve métamorphosée. Stephan Eicher propose de « franciser » une de ses nouvelles chansons. Il donne alors la parole à « l’accordéon qui joue tout seul » octroyant ainsi un côté « Bistro parisien » à la salle du Silo. L’animation s’affole légèrement, prenant des airs de Fête de village, avec un peu plus de classe que les fêtes de villages françaises, le côté « Suisse » de l’artiste y étant sûrement pour quelque chose.

Pour la chanson suivante, Stephan Eicher a choisi de nous faire rentrer dans un environnement digne des plus grands films français. Romantique et romanesque, après un aparté amusant sur les écarts générationnels provoqués par les nouvelles technologies, il nous présente le célèbre « Déjeuner en paix ». L’Intrigue de la chanson est miraculeusement bien retranscrite. Son énergie également, d’autant plus que l’artiste nous propose différentes interprétations de celle-ci. Le public est à son comble, en demandant toujours plus, pour que son plaisir ne prenne fin.

 

Après d’autres touches musicales s’ensuit une chorale faisant alterner les filles du public, Stephan Eicher, et un fan présent dans les balcons. Ce fan, ayant fait preuve d’audace, s’est imposé comme le personnage secondaire du spectacle en interpelant à maintes reprises l’artiste avec des propos décalés et ingénieux. Ces propos lui ayant valu la remarque suivante de la part de Stephan : « je reconnais bien là mon public ! ». La chorale créée a permis de propager le refrain de « Pas d’amis comme toi », avec, en arrière-plan, les projecteurs, le piano et la grosse caisse en plein mouvement.

Une fontaine de lumière a ensuite initié un medley reprenant une partie des chansons de Stephan Eicher traitant des boissons. La première chanson, interprétée au piano, a été traduite en français en live, phrase par phrase, avec des commentaires et des touches d’humour, pour rester dans le ton.

Stephan Eicher, Und die Automaten Le spectacle a continué jusqu’à ce qu’il touche à sa fin. Vinrent ainsi les présentations décalées « A la batterie, je vous présente la batterie !» avec un solo de chacun des instruments et automates présents : basse, piano, glockenspiel, orgue, accordéon, bobines Tesla, etc. Les présentations prirent fin sur une explosion de sonorité digne des « fausses manips » des professeurs fous caricaturés dans les dessins animés.

Le rappel s’est fait, et le public a dû prendre part dans la création sonore en programmant les réveils de chacun à la même heure, concevant ainsi, une composition musicale digitale participative.

Le public s’est ensuite dirigé vers la sortie, sourires aux lèvres, en chuchotant des remarques issues du champ lexical de l’émerveillement et de la stupéfaction.

Cette soirée fut une belle réussite, un cabinet de curiosités prenant des airs de cabaret féérique, allant même jusqu’au bref passage rock’n’roll…

CET ARTICLE A ÉTÉ RÉDIGÉ PAR :

Léa Sapolin
Rédactrice en chef adjointe et webmaster d'Extended Player. Amoureuse du rap français et des bonnes punchlines, je pilote la section rap du mag depuis que j’ai 11 ans (oui, déjà !). En parallèle, je suis communicante freelance et chef de projet web, avec une expertise en e-commerce. Toujours connectée, toujours à l'affût des sons qui parlent et qui touchent !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *