Il est considéré comme un des artistes HipHop les plus polyvalents, avec une identité forte. D.Ace excelle dans la technique, mais pas que. D.Ace, c’est le rappeur capable de séduire tant les puristes, que la nouvelle génération d’auditeurs, consommateurs de pop urbaine. Il a cette capacité à passer d’un son dansant à un rap plus textuel & technique, le tout en restant convaincu que les morceaux à messages doivent primer. Oui, l’artiste est de ceux qui ont découvert le rap avec Youssoupha, et il continue d’en écouter avec Dinos. Mais ses addictions ne se résument pas au rap, il semble avoir un fort penchant pour les mangas, passion qui l’inspire et qui se ressent dans sa musique.
Doté d’un master communication & marketing, l’homme sait user de bonnes stratégies pour développer sa fan base : il opte pour des vidéos courtes & scénarisées, il laisse le public le challenger en lui envoyant des mots à placer dans ses textes et, il utilise certains de ses morceaux tels des énigmes pour divulguer des indices sur ses prochains projets. C’est donc de cette manière que son nouvel album « Vox Cordis », annoncé pour le 28 février, commence d’ores et déjà à faire parler de lui. Vous trouverez d’ailleurs quelques morceaux clippés déjà diffusés sur la toile.
Actuellement en tournée, nous avons profité de son passage à Marseille (lien vers le report de la soirée) pour le questionner sur sa nouvelle œuvre et avoir quelques actus en avant-première.
Pourriez-vous vous présenter avec une punchline ou une rime de votre prochain album « Vox Cordis » qui sort le 28 février ?
D.Ace : « Je ne veux pas qu’on parle de moi au passé comme Croc-Blanc, j’ai déposé les armes dans ce rap game, je suis en paix, j’ai sorti le drapeau blanc. Avant je savais que pé-ra, maintenant je fais de la musique. Ouais j’ai plus de corde à mon arc, mais je sais toujours manier le fusil ».
C’est dans l’« Outro »
Dans un de vos freestyles, vous dites « ça fait des semaines que je tease l’album, tellement pressé que ça me fout la frousse ». L’album sort vraiment prochainement, dans quel état êtes-vous ?
D.Ace : Honnêtement, je me sens bien. Je suis content que l’album soit enfin annoncé, que la track-list soit dévoilée et que le public soit au courant du projet parce que, franchement, j’avais hâte de leur annoncer et de leur montrer l’univers de l’album, la cover, les featurings, tout ce sur quoi on a travaillé tout ce temps. Là, je suis juste impatient.
La sortie de l’album a été décalée. Il semblerait que ce soit à cause de prods incroyables reçues avant de le sortir, prods qui devaient, selon vous, être impérativement sur l’album. Ainsi, quels sont les morceaux retardataires ?
D.Ace : Les deux tous derniers morceaux qui ont été ajoutés sont « Dis le moi » et « KESTUVEUX ». Mais cela a été repoussé pour plein de raisons, dont celle-là. Il y avait des morceaux dont je n’étais pas 100% satisfait et des morceaux que j’avais fait après la première track-list. Certains sons, je pense, méritaient moins de figurer sur « Vox Cordis » par rapport à d’autres. Il y avait un remaniement à faire, notamment par rapport à la couleur de l’album.
Est-ce que ces morceaux vont tout de même être dévoilés ?
D.Ace : C’est fort possible. Un morceau fait n’est jamais perdu. Je pourrai le balancer peut-être en single, peut-être dans un prochain projet ou sous forme de freestyle que je mettrai sur les réseaux sociaux. Il peut avoir une seconde vie.
Vous dîtes que cet album est plus introspectif que le précédent. Quel est le morceau dans lequel, selon vous, vous vous livrez le plus ?
D.Ace : « À cœur ouvert » puisque c’est un morceau dans lequel je parle d’une femme, ou du moins, je parle à une femme. Je dis des choses que je n’avais pas osé lui dire. Ce morceau est une sorte d’exutoire, de déclaration, d’où le titre « À cœur ouvert ». Je me livre sans tabou, sans retenue.
Un journée type en studio ça se passe comment ? Vous arrivez avec quoi ? Vous repartez avec quoi ?
D.Ace : Ça dépend de plein de choses. Autant il peut y avoir des jours où j’arrive en studio avec quatre textes, créés sur quatre prods et je repars avec quatre morceaux. Autant j’arrive avec rien et je pars avec un seul son, mais que j’ai peaufiné et travaillé de A à Z. On passe donc 8 heures en studio, avec des compositeurs qui ont créé la prod en direct, j’ai ensuite écrit les textes sur la prod puis posé le morceau. Le processus est bien plus long que lorsque j’arrive avec déjà tout, il y a tout à faire.
Quels ont été les acteurs de « Vox Cordis », votre nouvel album ?
D.Ace : Il y en a énormément. Il y a Major Black, Noxious, Greenfinch, Yamamuzik, un collectif de beatmakers « Mutoashigori ». II y a aussi Heezy Lee, MattRach, Gravity, qui est le producteur du morceau « Manga 4 ». J’en oublie, il y a pas mal de gens. Il y a aussi mon équipe de management qui, même si ces personnes n’ont pas composé, ils étaient là pour superviser pas mal de trucs. C’est vraiment un album où je me suis beaucoup entouré, contrairement au précédent album où j’avais écrit et travaillé seul. Là j’ai travaillé avec différentes personnes, sur la construction des morceaux également, ce que je ne faisais pas avant.
A la rédaction, nous vous avons découvert tard, avec le morceau « La mémoire des jours », de Greenfinch, justement. Pourriez-vous nous raconter comment s’est faite la rencontre avec Greenfinch et comment a été créé le morceau ?
D.Ace : Greenfinch, c’est justement celui qui a composé le morceau « À cœur ouvert ». On avait bossé ce morceau il y a plus d’un an et demi. Puis il m’a contacté pour faire « La mémoire des jours ». Il avait décidé de faire un morceau avec différents rappeurs avec lesquels il avait aimé bosser, dont moi. J’étais flatté donc, évidemment, j’y suis allé volontiers. Il a donné la thématique et la prod et j’ai écrit mon couplet. Ça s’est passé aussi simplement que ça. À la fin le résultat est, je pense, appréciable.
C’est aussi Greenfinch qui est à la prod de « Juge », morceau en featuring avec Davodka. Pour celui-ci, la combinaison avec Davodka c’est fait très simplement. Quand deux artistes veulent bosser ensemble, ça va vite.
Cet album contient 19 titres il me semble, pourriez-vous choisir un mot pour décrire chacun d’entre eux et mettre l’accent sur celui qui a été le plus long à écrire, nous raconter son histoire ?
« Ace », c’est un morceau avec une grosse empreinte africaine en raison du sample qui a été utilisé. C’est une grosse dynamique. C’est le premier morceau de l’album, sachant que l’intro n’est pas un son. Il met directement l’auditeur dans le bain. C’est-à-dire que D.Ace c’est ça : une énergie, du texte, de la technique, de la Punchline.
« Charmant », en featuring avec S.Pri Noir, c’est un morceau ironique. Comme le dit le refrain, « On n’est pas les mecs d’avant, c’est démodé d’être galant », c’est vraiment pour dire qu’aujourd’hui on est des êtres humains, on n’est pas les princes charmants des contes de fées. Il faut faire avec nous. C’est vraiment de l’autodérision.
« Johnny », c’est un morceau plein d’espoir, d’envie, de combativité. Johnny c’est celui qui, en France, incarne le succès. Je ne pense pas qu’il y ait d’autres artistes français qui aient sa renommée. Pour moi, l’objectif ultime c’est « Johnny » musicalement parlant. Dans ce son, je parle de mon désir d’arriver à son niveau, de réussir à remplir des stades, de soulever les foules un peu comme lui.
« Je m’en fous » est un morceau hyper dans l’autodérision. Je m’en fous de tout, il n’y a pas grand-chose qui m’emporte si ce n’est quelques trucs. On est vraiment dans un son très dans l’air du temps au niveau des sonorités, du flow. C’est quelque chose de vraiment jovial, de très humoristique. C’est un morceau qui peut énormément plaire aux gens. Les mélodies restent en tête.
Donc, sur celui-ci vous avez bossé avec un topliner ?
Hum, je l’ai bossé oui avec un topliner, en quelque sorte.
« Hokage », c’est vraiment un morceau qui me tient à cœur. J’aime beaucoup faire des morceaux sur le fait de s’accomplir, de repousser les limites, aller toujours plus haut, toujours plus loin, le fait de croire en soi. Aujourd’hui on est beaucoup à ne pas avoir confiance en soi, à se comparer aux autres et trouver que nous ne sommes pas à leur niveau, alors on se dévalorise et il ne faut pas. C’est le message de « Hokage », un peu comme dans Naruto. Naruto, au début, est considéré comme le raté du village, puis finalement il devient le « Hokage », le meilleur Ninja du village. N’importe qui peut y arriver, c’est le message de ce morceau.
« Dinguerie », comme son nom l’indique, c’est une dinguerie. C’est la folie, le peps, l’énergie. C’est vraiment un des morceaux les plus pétants et les plus radiophoniques de l’album. Sur celui-ci, j’ai bossé avec des topliners pour le coup. À la prod c’est Noxious. Noxious a travaillé avec Booba, MHD, Kaaris, Niska et j’en passe.
« Tout et tout de suite », c’est un très beau morceau. C’est un morceau que j’apprécie particulièrement avec Kai-Jo Black à la prod. C’est un morceau qui traite de la volonté des gens de la société, de notre air, de toujours vouloir tout et de ne pas se contenter. On est toujours dans la recherche du « plus » : « Je veux plus, je veux aller plus loin, je veux mieux », etc. On ne se satisfait jamais de ce que l’on a. Ce que untel peut avoir, c’est ce que l’autre a. Nous ne sommes pas tous à la même échelle. Par exemple si on veut faire un petit comparatif, ici on pleure pour un iPhone alors qu’en Afrique on pleure parce qu’on a faim. Il faut savoir se contenter. C’est un morceau pour conscientiser un peu les gens.
« La vérité » est un morceau où je balance des vérités générales sur la vie de tous les jours. C’est de la punchline, du kickage pur et dur. C’est vraiment un morceau où je suis dans la performance.
« Manga 4 », c’est dans la lignée des « Manga » que j’ai fait. J’avais fait le 1, 2, 3, et là c’est le 4. C’est toujours pareil, de la punchline, du flow, et des références mangas, encore plus. Je pense que, de tous les « Manga » que j’ai faits, c’est le plus abouti dans le sens où dans « Manga 4 », quand on l’écoute, on peut ne pas se rendre compte que je parle des mangas. J’ai essayé de le travailler de telle sorte que les références se fondent vraiment dans le morceau alors que, dans les « Manga » précédents, elles étaient plutôt évidentes, plus téléphonées. J’ai vraiment fait en sorte qu’un auditeur lambda puisse l’écouter et se dire « Ah c’est un bon morceau », mais ce sera encore plus impactant pour quelqu’un qui comprend les références, forcément !
Ensuite, il y a l’interlude. Puis, il y a « Le jour où ». C’est un morceau où je parle du jour où mes parents ne seront plus de ce monde. Je m’interroge sur la manière dont je réagirai, dont je verrai les choses, la manière dont j’encaisserai la nouvelle. On sait très bien qu’on est éphémère. Forcément, ce sont des choses qui sont amenées à arriver, dans un futur le plus lointain possible on l’espère.
Tu me demandais quel était le morceau le plus introspectif, je t’ai répondu « À cœur ouvert », mais cela aurait pu être « Le jour où » aussi. C’est un des seuls morceaux où j’ai déjà eu les larmes aux yeux en le réécoutant. Un de mes propres morceaux.
Et comme D.Ace en a surement trop dit sur son prochain album, le destin a décidé d’arrêter l’enregistrement. On n’aura donc pas de sauvegarde de la fin de l’interview de l’artiste. Voici tout de même ce que, de mémoire, il nous a répondu :
« Vox Cordis » est le cœur du projet. Quand on l’écoute, on comprend tout l’album. Mais je ne vais pas trop en dire pour ne pas spoiler. Effectivement, au départ le titre était au début du projet, mais il correspondait moins avec les morceaux d’avant l’interlude. L’album est en deux parties. Musicalement ce titre devait être à cette place-là. En plus, comme c’est le cœur du projet c’est assez logique de le placer au milieu.
« À cœur ouvert » est donc un morceau où je me livre.
« KESTUVEUX » résulte du fait que je me sois rendu compte qu’il y avait beaucoup de personnes qui s’étaient mises à graviter autour de moi une fois que j’ai commencé à percer. Ce n’était pas le cas au début, et, dans ce titre, je leur demande pourquoi, ce qu’ils veulent.
Nous ne nous rappelons plus exactement comment D.Ace a décrit « Étranglement », mais nous avons eu la chance de voir le morceau en live sur scène (lien vers le report du concert) et on peut dire que c’est le morceau ou D.Ace lâche son énervement en toute puissance sur ceux qu’il n’apprécie guère, les jaloux et rageux qui le critiquent.
« Juge » feat Davodka (Découvrir l’interview de Davodka) permet de faire un parallèle. Davodka prend le rôle d’un blanc et moi le rôle d’un noir. On confronte nos vécus et points de vue. Je suis très satisfait de cette collaboration.
« Dis le moi » parle d’un mec qui a fait une erreur avec sa copine. Elle annonce qu’elle l’a pardonné, mais cela ne semble pas être le cas. Du coup, il lui demande de lui dire si elle l’a vraiment pardonné et s’ils peuvent aller de l’avant ou, à l’inverse, si elle n’a pas réussi et qu’il faut s’arrêter là.
« Malagasme » est l’anagramme d’amalgame. Je parle donc dans ce son des clichés et amalgames qui sont faits sur certaines typologies de personnes.
« Je t’aime » sera le morceau « surprise » pour lequel nous ne dévoilerons pas ce que D.Ace nous a raconté à son sujet.
« Outro » est le titre de l’album que je réécoute le plus. Il est court et c’est ce qui fait sa puissance.
Parmi l’ensemble de ces morceaux, quel a été le plus long à écrire ?
« Dinguerie » n’a pas été le plus long à écrire, mais c’est celui qui a été le plus long à être enregistré. Je n’étais pas habitué à bosser sur ce type de son. Il a fallu monter dans les aigus, bosser avec des topliners. J’ai dû sortir de ma zone de confort. Mais le morceau qui a véritablement été le plus long a écrire c’est « Dis le moi ».
Pour clôturer cette interview, voici son dernier freestyle sorti le 14 février, à l’occasion de la Saint Valentin, ainsi que deux freestyles qui ont fait parler de lui, puisqu’il réagissait à des actualités :
Nous remercions D.Ace, son équipe et celle du Moulin de nous avoir permis de faire cette interview.
CET ARTICLE A ÉTÉ RÉDIGÉ PAR :
- Rédactrice en chef adjointe et webmaster d'Extended Player. Amoureuse du rap français et des bonnes punchlines, je pilote la section rap du mag depuis que j’ai 11 ans (oui, déjà !). En parallèle, je suis communicante freelance et chef de projet web, avec une expertise en e-commerce. Toujours connectée, toujours à l'affût des sons qui parlent et qui touchent !
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Interview super intéressante, merci Extended Player Mag.
Merci beaucoup 🙂