Un acronyme énigmatique et un vase abordant un taureau semblable celui de la légende grecque du Minotaure. Aucun indice n’est apparent lorsque l’on observe le premier album d’HMLTD, le groupe franco-anglais tout aussi chaotique dans sa cohésion de groupe que dans sa construction musicale. Si rien n’a de sens, cela n’en reste pas moins une expérience séduisante qu’ils nous offrent. Bienvenue dans « West of Eden », dernier chef-d’œuvre d’un groupe infusant une plâtré de genre en un disque quelque peu novateur.

Voici l’histoire de deux Anglais, trois Français et un Grecque tous plus extravagants les uns que les autres dans leur style vestimentaire constitué de costume aux couleurs éclatantes, de chemise au motif inimitable ainsi que d’un maquillage imprécis dégoulinant à cause des sueurs qui perlent sur leur visage lors des concerts. Une impression de fouillis contant en accord avec leur musique. En effet, difficile de classer les bougres dans un genre tellement leur musique est disparate et se propage dans des directions diamétralement opposées. Parfois punk avec les riffs de guitares dissonants, puis ambient par des nappes électroniques rêveuse puis finalement HipHop dû à des batteries digitales de Roland Tr 808. Pour autant, nous sommes face à une œuvre homogène dans son hétérogénéité qui mérite d’être désossée. Tout ce que nous savons est qu’ils poussent les limites de la musique pour offrir une cacophonie majestueuse.

Pour déchiffrer « West Of Eden », il faut tout d’abord se pencher sur sa symbolique. À commencer par ce titre d’album énigmatique porteur d’une thématique religieuse. Reprenant l’histoire de la Bible et sa terre promise, celle dont furent bannis Adam et Ève après avoir croqué dans la pomme, le groupe effectue un calque avec les États-Unis en le comparant à l’Éden déchu. Le chanteur du groupe, Henry Spychalski, dit vouloir évoquer l’Éden lorsqu’il n’est plus qu’un vague souvenir transformer en No Man’s Land. Pour lui, l’Amérique du Nord reflète bien ce « paradis » car ce n’est plus qu’un continent autrefois rempli d’espoir, mais qui sombre rapidement dans l’immoralité, la luxure et tout autre péché capitaux. Une longue décadence de l’Amérique prenant alors la forme d’une ombre planant au-dessus de chaque morceau. L’on suit une odyssée à travers le personnage biblique de Caïn, fils d’Adam et Ève qui avait tué son frère Abel, et qui, suite à cela, sera renié de sa famille pour être prisonnier dans ces terres autrefois promises. Alors, dans cet album, nous suivons la quête d’errance de cet homme, découvrant la violence et l’humiliation. En quinze pistes, ce sont les penchants les plus inavouables que nous font subir HMLTD. Quant au Minotaure qui éructe sur la pochette, il vient représenter le mythe, le rêve d’un système capitalisme pérenne, un rêve qui se métamorphose petit à petit en désastre. Une histoire donc bien rodée et mûrement méditée par le groupe.

La terre devenue malgré elle infertile est officiellement morte. Cela nous est confié dès la première piste sobrement intitulée “The West is Dead” contant le décor décousu de ce monde. Un manifeste en guise d’introduction pour cette longue lettre adressée à l’auditeur. Les cordes de guitare aux allures de ballade country nous projettent la décadence meurtrière de l’Amérique à travers Cain. Une piste pleine d’énergie avec un mélange acidifié qui retranscrit parfaitement la suite du disque. Car ce qui prime ici est la brutalité des guitares électriques et la voix déchirante du chanteur aux mèches dorées.

Ce mélange de genre déconcertant se manifeste sous diverses formes. Si des influences country se retrouvent dans le piano-bar de “Joanna” ou l’interlude “The Ballad of Calamity James” respirant les plaines sauvages, ce sont, à l’inverse, des rythmes endiablés que l’on retrouve dans “Loaded”. Tel un coup de pistolet à l’écho interminable, on nous offre des guitares propulsées par des pédales de distorsions qui s’entrechoquent. Pas si étonnant lorsque l’on sait que l’antagoniste du titre vend son âme au diable pour briller sous les néons des plateaux télévisés. “Death Drive” repose sur les mêmes mécanismes, avec l’intention de nous faire ressentir un accident de voiture à travers la voix écorchée de Spychalski, mais surtout par ces batteries explosives recouvertes de crissements angoissants, traduisant alors la descente aux enfers d’un homme piégé par les couleurs monstrueuses du monde. Pour autant, on distingue aussi un désir d’infuser des chants envoûtants. Car si une esthétique très punk reste présente sur une majeure partie des titres, des nappes émotionnelles s’insèrent ici et là. L’exemple de “Santa, Leulla and I” est un exemple probant passant d’une charge électrique à haut voltage pour s’adoucir avec des chœurs religieux surplombés d’une voix féminine cristalline. Plus encore, des vagues électroniques tendres qui montent en crescendo s’accordant avec des drums cybernétiques dans “Nobody stay in love”. Dans un registre toujours plus énigmatique, l’on peut évoquer Why?” aux s’influences japonaise ou bien “Blank Slate” certes plus classique dans son approche des instruments, mais qui insurge une montagne d’émotion non négligeable.

À la fois déconcertant et réconfortant, HMLTD brasse une variété de pâte sonore tout en restant cohérent du début jusqu’à la fin. L’esthétique unique des cinq membres se ressent également par leurs visuels gore et queer se mêlant à un symbolisme fort donnant alors naissance à une œuvre unique : la chute d’un pays et d’un homme se désolant d’aimer des vices qu’il a lui-même bâtit. Le tout sur une bande originale dansante et glamour.

CET ARTICLE A ÉTÉ RÉDIGÉ PAR :

Axel Bodin

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